RDC: « Les sports de combat ne sont pas pris en charge par le gouvernement…Parfois nous voyagions sans argent pour dormir et mangions dans des conditions très difficiles » (Tshiaba)

La légende du karaté de la RDC Nancy Tshiaba a décidé de mettre fin à sa carrière d’athlète pour embrasser la carrière de coach et arbitre. Elle explique ce départ en retraite à 31 ans par le souci d’encadrer les jeunes qui vont assurer la relève. Dans une interview avec Sport News Africa, celle qui a été plusieurs fois médaillée continentale regrette que le gouvernement congolais ne lui ait pas donné la chance de faire des meilleurs résultats.

Sport News Africa : Nancy Tshiaba vous avez annoncé avoir mis fin à votre carrière d’athlète. Quelles en sont les raisons ?

Nancy Tshiaba : Nul ne peut ignorer que j’ai eu à faire mon temps et j’ai pensé qu’il était temps de laisser la place à la jeunesse montante qui est très talentueuse et prometteuse. J’ai pensé que je devais évoluer autrement maintenant en encadrant cette jeunesse pour qu’elle ne commette pas les mêmes erreurs que nous avions commises.

Nancy Tshiaba avec la médaille de bronze remportée en Égypte lors des derniers Championnats d’Afrique.

Vous allez en retraite à 31 ans, n’est-ce pas trop tôt ?

Parfois il faut faire l’exception ; il ne faut pas toujours attendre 40 ans ou 50 ans pour prendre sa retraite. Lorsque les gens veulent te voir durer dans une discipline pendant très longtemps, tu peux les surprendre en allant plus tôt qu’attendu; je ne suis d’ailleurs pas partie, je me suis juste transformée. Il faut quitter les choses avant que les choses ne vous quittent. Moi je pense avoir pris cette décision au bon moment après une dernière médaille gagnée aux championnats d’Afrique en tant qu’athlète.

Après 18 ans passés en tant qu’athlète de l’équipe nationale, quel bilan dressez-vous de votre carrière ?

Mon bilan est positif car j’ai été à des nombreuses reprises sur le podium africain. Aux Championnats d’Afrique, j’ai remporté trois médailles de bronze en 2009, 2017 et 2021 ainsi qu’une médaille d’argent en 2007. Au niveau de l’Afrique centrale, j’ai gagné deux médailles de bronze. Au niveau national j’ai été championne de la RDC de 2004 jusqu’à ma retraite et j’ai aussi participé aux championnats du monde. C’est une bonne carrière et je pense avoir représenté mon pays comme il le fallait.

«Les sports de combat ne sont pas pris en charge par le gouvernement de notre pays et nous avions passé des moments très difficiles en équipe nationale. Nous dormirons et mangions dans des conditions très difficiles. manger. C’était vraiment difficile.»

Quel est le meilleur souvenir que vous gardez de votre carrière ?

Ce sont mes deux médailles extrêmes remportées aux Championnats d’Afrique, la première en 2007 et la dernière en 2021

Quelles sont les difficultés rencontrées durant votre carrière ?

Ça n’a pas été facile en tout cas. J’ai donné le meilleur de moi mais rien n’a été facile. Les sports de combat, pour la plupart, ne sont pas pris en charge par le gouvernement de notre pays et nous avions passé des moments très difficiles en équipe nationale. Nous dormirons et mangions dans des conditions très difficiles alors que nous allions représenter le pays aux compétitions continentales. Parfois nous voyagions sans frais de mission et parfois sans argent pour dormir et manger. C’était vraiment difficile.

Ces difficultés vous ont-elles découragée à un certain moment à continuer à servir le pays ?

Non, cela m’encourageait à donner encore le meilleur de moi pour ne pas finir comme les autres. Je voulais sortir par la grande porte pour ensuite faire en sorte que les générations futures ne puissent pas connaître les mêmes difficultés que nous.

Qu’est-ce qui freine le développement du karaté congolais selon vous ?

C’est le côté technique. La fédération doit beaucoup travailler sur ce côté-là. Les cadres techniques doivent être formés afin de mieux transmettre la matières aux athlètes. À part le côté technique, il y a aussi le manque d’infrastructures et matériels adéquats. Mais le problème des infrastructures est un problème générale que connaissent toutes les disciplines en RDC.

«Je suis née karatéka et je mourrai karatéka. Cette passion ne me quittera jamais.»

Vous vous êtes convertie en juge arbitre et coach, cela veut dire que la passion du karaté demeure encore en vous malgré votre retraite internationale en tant qu’athlète ?

Je suis née karatéka et je mourrai karatéka. Cette passion ne me quittera jamais.

Que comptez-vous accomplir en tant que coach que vous n’avez pas réussi à accomplir en tant qu’athlète ?

Remporter une médaille d’or sur le continent et une médaille au niveau mondial ainsi qu’une autre au niveau olympique. Je sais que ça ne sera pas facile, mais nous sommes en train de travailler sur une jeunesse montante qui promet beaucoup et nous donnons le meilleur de nous-mêmes, tout en espérant qu’avec le temps le gouvernement va comprendre l’importance des arts martiaux et va nous soutenir pour y arriver.

Vous êtes la référence du karaté congolais et vous partez en retraite. La relève est-elle assurée ?

Oui, la relève est assurée. Il y a des jeunes qui montent et dont je suis fière. J’en ai vu lors des derniers Championnats nationaux et au dernier tournoi des Grands Lacs. Je me suis dit que je n’avais pas tord d’aller en retraite pour qu’enfin elles soient mises en lumière. Nous continuons à travailler avec elles pour qu’elles réussissent à faire mieux que ce que j’ai fait.

Nancy Tshiaba dans son nouveau rôle de coach.

Est-il possible pour vous de revenir sur votre décision d’aller en retraite ?

Non, c’est impossible que je revienne sur la décision.

Comment comptez-vous aider la RDC avec tout ce que vous avez appris pendant votre carrière ?

Je suis déjà en train d’aider la nation en encadrant des jeunes dans mon club. Je suis en équipe nationale en tant que coach dame. Je suis donc en train de transmettre ce qu’on m’a transmise gratuitement.

Quel message lancez-vous aux jeunes filles qui hésitent encore à pratiquer le karaté ?

Je leur demande de ne pas étouffer leur talent car ce sont elles qui perdent. Moi j’ai été une fois orpheline et rejetée par la société, mais aujourd’hui on parle de moi grâce au karaté. J’avais un talent que je n’avais pas négligé et que j’ai mis en pratique. Aujourd’hui ça a payé car j’avais la détermination. J’encourage surtout les parents à envoyer leurs jeunes filles au sport car ça va leurs permettre de s’épanouir.

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