L’attaquant international congolais Trésor Mputu met fin à sa carrière à 37 ans. Il restera comme un immense talent qui a préféré tourner le dos aux sirènes des clubs européens, et s’épanouir au Congo et en Afrique.
Après avoir traîné son spleen pendant de très longues semaines, à jouer les intermittents, et rester ces six derniers mois sans fouler une pelouse avec son club, Trésor Mputu a finalement confirmé ce que tout le monde savait déjà. Ce mercredi 8 février, l’attaquant congolais a officialisé laconiquement sa retraite des terrains de football au cours d’une interview avec Nyota RTV, un média proche du club Tout Puissant Mazembe. Le rideau tombe donc sur la carrière de l’un des joueurs les plus talentueux du continent africain ces 20 dernières années. Une véritable légende au Congo, mais dont les représentations n’ont eu que très peu d’expositions médiatiques en Afrique et surtout dans le reste monde. Ceux qui l’ont côtoyé et entraîné, comme le Français Claude le Roy, le voit prendre place naturellement à la table des plus grands talents du foot africain. « La place de Trésor Mputu est parmi les plus grands joueurs africains, martèle celui qui a découvert le prodige au Congo quand celui-ci n’avait que 19 ans. Il y en a qui ont été sacrés Ballon d’or africain et qui n’avaient pas son talent, loin s’en faut. »
L’envie d’avoir envie…
« C’est le genre de joueur qui pouvait vous faire gagner un match, un tournoi, un trophée », ajoute le Sénégalais Lamine Ndiaye qui avait conduit le TP Mazembe en finale de la Coupe du monde des clubs en 2010. « Quand il avait vraiment envie, il était au niveau des meilleurs joueurs africains ».
L’envie, justement, a toujours été au cœur de la carrière du natif de Kinshasa. Son talent aurait pu faire le bonheur de plusieurs grands clubs européens. Arsenal et Arsène Wenger ont été ainsi à deux doigts de voir Mputu enfiler la tunique des Gunners. Mais l’éternel numéro 8 n’a jamais eu envie de quitter le nid des Cordeaux de Mazembe. Parce qu’à Lumumbashi, il était un dieu vivant. Parce que son président et « papa » Moïse Katumbi ne lui refusait rien ; l’argent, les voitures, et son avion pour aller faire la fête à Kinshasa de temps en temps. « Trésor pouvait jouer dans pas mal de grandes équipes en Europe, regrette Lamine Ndiaye. Il avait toutes les qualités pour s’imposer partout ».
« Trésor est un parfait exemple »
La liste, non exhaustive, des équipes qui se sont intéressées au talent du joueur est long comme le bras : des clubs anglais (Blackburn, Hull City, Tottenham), français (Nantes, Olympique de Marseille), grec (Olympiakos), tunisiens (CS Sfaxien, Espérance sportive de Tunis, Club africain, Étoile sportive du Sahel), turc Galatasaray ou du golfe Persique. Aucun n’a réussi à attirer Trésor Mputu qui n’aura eu, en définitive, qu’une seule expérience à l’étranger : trois saisons dans le club angolais de Kabuscorp avant de revenir à la maison.
« La trajectoire de Trésor, c’est celle dont je rêve pour des milliers et des milliers de jeunes footballeurs africains, confie Claude Le Roy. Faire le choix de rester dans son pays parce qu’on le traitait bien, parce qu’il y a des conditions économiques plus que dignes et qu’il ne voyait pas l’intérêt de s’expatrier. C’est pour cela que je me bats depuis si longtemps ; un professionnalisme à l’africaine, adapté aux réalités africaines, qui permettrait à des milliers et des milliers de jeunes footballeurs de vivre de leur talent et de leur passion sans avoir besoin de prendre des pirogues ou de traverser le désert. Un bon footballeur peut réussir en Afrique, mais il faut un président comme Moïse Katumbi, il faut un grand club comme le TP Mazembe ».
Avec la formation de Lumumbashi, Trésor Mputu gagnera deux Ligues des champions CAF (2009, 2010), une Coupe de la Confédération (2017), deux Supercoupes d’Afrique et le titre meilleur joueur évoluant sur le continent en 2009.
Avec l’équipe nationale, l’aventure ne sera pas aussi belle (54 sélections, 14 buts, 4 CAN), mais tout le monde s’en doutait, le meilleur buteur de l’histoire des Coupes d’Afrique des clubs (41 buts) avait donné depuis longtemps son cœur et son talent au TP Mazembe.
rfi