Preben Kabamb, (19 ans) grand espoir de l’athlétisme congolais, se prépare pour participer aux prochains Championnats du monde aux États-Unis (du 15 au 24 juillet). Fin mai, il a pris part aux Championnats africains en Ile Maurice, où malgré sa blessure, il a couru les 100 mètres en 11 secondes. Il s’est ouvert à ActuRDC sur sa préparation et ses rêves.
À l’approche des Championnats du monde, comment te prépares-tu ?
Tout a changé, j’étais à un autre niveau de préparation et tout à coup boom ! (il lève la main vers le ciel) Je suis conscient du niveau devant moi, c’est le niveau sénior et ce n’est pas n’importe qui y participe.
J’étais surpris quand j’ai appris la nouvelle de ma sélection, mais avec l’aide du Coach Makok, ma préparation se déroule très bien. Le matin je suis en salle et le soir je m’entraine sur la piste. C’est un rythme que je n’avais pas avant, aujourd’hui, j’adapte mon corps du mieux possible.
Est-ce que tu rêves à tes débuts de disputer cette compétition dans ta carrière ?
Non ! J’ai commencé par les Jeux salésiens, ensuite l’entente d’athlétisme. En voyant les réalités d’entrainements et de compétition, j’avais perdu espoir. Quand M. Gabriele Salmi (sponsor et fondateur de Nyota Athletic Club) est arrivé, nous avons retrouvé de l’espoir. Il a d’abord créé Nyota où les athlètes évoluaient dans de bonnes conditions. À l’époque j’étais dans un club, qui n’existe plus aujourd’hui, où il arrivait que nous ayons une compétition vendredi et jeudi nous ne savions pas si nous allions participer, même quand j’étais devenu détenteur du chrono provincial. Depuis que je suis à Nyota, la préparation se passe bien et je me sens en pleine évolution.
Comment t’es-tu orienté vers l’athlétisme, alors que les jeunes vont souvent vers le foot ?
(Rires). Je viens du foot aussi ! J’y ai joué aux Jeux salésiens et c’est lors de ces mêmes compétitions que j’ai été repéré. On m’a proposé de participer à l’athlétisme, en 2016, et je m’y suis mis. Au début, je ne courrais pas, je faisais des sauts en longueur. Une fois, je me suis frotté au champion et je l’ai battu deux fois ! Les gens qui l’ont vu sont partis raconter au coach que j’avais battu le champion à deux reprises et il a demandé ç me voir. J’ai participé aux Jeux où j’ai obtenu deux médailles d’or et l’année suivante je suis monté en équipe nationale.
Quelles sont tes performances au niveau national ?
Dès ma première année, j’ai été sélectionné pour les Championnats nationaux d’athlétisme. À Kinshasa, je devais courir les 100 et les 200 et parce que j’étais arrivé avec un retard, je n’ai fait que les 200M ou j’ai fini troisième national. J’ai participé à mes deuxièmes Championnats nationaux où j’ai fait le saut en longueur, obtenant une médaille d’argent (deuxième).
Quelle est la relation entre le coach Makok et toi ?
Déjà je le considère comme un père. C’est avec lui que j’ai commencé aux jeux salésiens. Il a montré ses photos lors de ses participations aux Jeux olympiques d’Athènes, ses compétitions à Paris, pour moi c’est un modèle à suivre.
T’es-tu senti motivé en voyant ces images ?
Je dois dépasser mon coach (rires)
Comment organises-tu ta vie en dehors des entrainements
Pour les questions de diététique, Coach Makok en sait beaucoup. Il m’oriente et me fixe les règles, surtout le respect de l’heure. Et quand tu as comme objectif les Championnats du monde, tu ne peux que suivre ces instructions avec discipline. Je dors tôt, au plus tard à 21h, je suis à la salle à 8h jusqu’à 11h. Je rentre à la maison pour me reposer, manger et revenir à la piste à 15h jusqu’à 17h.
Tu es encore jeune, que dirais-tu aux athlètes qui hésitent à vous rejoindre ?
Je voudrais surtout les inviter à venir. Ils vont adorer ce sport, j’en ai entendu, je suis venu et aujourd’hui j’ai en tête les Championnats du monde.
Coach Makok, vous le voyez vous dépasser ?
Coach Makok : avec la modernisation dans le sport, il va me dépasser.
Quels sont ses records ?
Aux 100m, il est à 10,50 secs aux 200 il est à 21 secondes. Ce n’est pas donné à tout le monde d’arriver à ce niveau de performance. En saut en longueur, il est à 7 mètres.
Que lui faut-il encore pour qu’il exploite son potentiel pleinement ?
Le problème c’est la discipline pour chaque athlète en suivant mes orientations, de ses parents et de ceux qui nous soutiennent. S’il est attentif à cela, je le vois aller très loin. C’est la première fois que depuis nos débuts en athlétisme une personne veut de son propre gré nous soutenir et ça fait trois ans qu’il le fait maintenant.
Parlez-nous aussi de filles et l’athlétisme
J’ai découvert beaucoup de talents parce qu’à part le coaching, je suis aussi responsable de sport scolaire donc je découvre des élèves, filles ou garçons qui ont l’avenir, mais le problème c’est l’encadrement, c’est un problème qui touche tout le Congo. Le gouvernement ne s’intéresse pas à l’athlétisme, seulement au football.
Vous occupez aussi des fonctions dans l’athlétisme national
Je suis directeur technique national adjoint de la RDC et entraineur national fédéral chargé de l’Est, le grand Katanga, Kasaï, Maniema. Mais à part Lubumbashi, Likasi et Kolwezi, partout ailleurs il n’y a pas d’athlétisme.
Quel travail doit être fait pour structurer ce sport et découvrir d’autres talents ?
La République doit songer à former des encadreurs. Au Kenya, où j’ai été plusieurs fois, il y a des endroits où il n’y a même pas de piste, mais les enfants s’entrainent dans la forêt ou dans la savane, mais deux ou quatre mois après quand ils vont aux championnats du monde, ils ramènent des médailles pour leur pays. Il faut structurer l’encadrement pas seulement dans le football. Les dirigeants peuvent nous aider l’athlétisme à grandir. Un athlète peut apporter deux ou quatre médailles, seul, mais au football, une équipe ne ramène qu’une seule !
Propos recueillis par Iragi Elisha